Priorité 1 : Le développement durable de la pêche et la préservation des ressources halieutiques
Espace de débat dédié à la priorité 1
Le FEAMP ne doit pas financer l’innovation
La PCP (Politique commune de la pêche) vise à réduire l’impact de la pêche sur les écosystèmes marins. Elle encourage ainsi "l’innovation" qui est perçue et promue comme la réponse aux défis environnementaux. Or, l’expérience montre que de graves dérives sont possibles à l’image de la pêche électrique, développée sous couvert d'innovation.
A.Rappel
Interdite en Europe depuis 1998, la pêche électrique a connu un nouvel essor à partir de 2007. Sous couvert d'innovation et sous prétexte de réaliser des économies de carburant, l’industrie néerlandaise a obtenu des dérogations et converti la quasi-totalité de sa flotte de chalutiers à perche à l’électricité. Cette pratique illégale a également bénéficié de plus de 20 millions d’euros de subventions comme l’a montré notre analyse des données du FEP (Fonds européen pour la pêche : 2007-2013) et du FEAMP (Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche : 2014-2020)[1].
Dans les faits, ces économies de carburant ont résulté d’une augmentation de l’efficacité de pêche. Tout ceci s’est donc fait au détriment des ressources marines et des pêcheurs artisans. En provoquant une chute des prises de soles, cette méthode a causé une hémorragie sociale dans les Hauts-de-France. Elle a entraîné la fermeture de la criée de Dunkerque[2] et provoqué des faillites en série.
Toutefois, la pêche électrique n’est pas un cas isolé. D’autres engins dits « innovants » sont actuellement sous le feu des critiques, comme la senne danoise[3]. Les pêcheurs côtiers dénoncent sa redoutable efficacité tandis que ses défenseurs font valoir les économies de carburant qu’elle permet.
B.L’innovation ne doit pas inclure des engins de pêche plus efficaces
L’innovation ne doit pas primer sur le principe de précaution[4]. Afin de préserver les équilibres socio-économiques et le milieu marin, le FEAMP ne doit pas financer des techniques qui augmentent la capacité de pêche et favorisent l’accaparement des ressources. Aucune économie de carburant ne peut le justifier.
Des garde-fous sont nécessaires pour prévenir de telles dérives. Comment la DPMA compte-t-elle s’assurer que des techniques destructrices ne seront pas financées dans le cadre du prochain FEAMP au nom de l’innovation ?
Références
[1] Voir Le Manach et al., 2019 : https://doi.org/10.1016/j.marpol.2019.03.003
[2] Voir La Voix du Nord : https://bit.ly/3qRSQj8
[3] Voir Sud Ouest : https://bit.ly/2Iw8W0m
[4] Voir Le Monde : https://bit.ly/3lZpsUo
Réponse :
La lutte contre la surpêche est un enjeu majeur au niveau mondial, promu et mis en œuvre par des organisations internationales et de nombreux Etats, dont la France, depuis plusieurs décennies. Pour atteindre ces objectifs, les ressources halieutiques pêchées par les navires battant pavillon français et européen font l’objet d’une gestion rigoureuse qui mobilise non seulement les services de l’Etat et ceux de l’Union européenne (UE), mais également les organisations professionnelles de pêcheurs, les organismes scientifiques et les ONG. Par la fixation de totaux admissibles de captures (TAC) fondés sur les plus récents avis scientifiques, la politique commune de la pêche (PCP) de l'UE constitue un cadre réglementaire strict qui permet la mise en œuvre d’une pêche durable dans les eaux de l’UE ainsi que dans les eaux extérieures à l’Union où pêchent des navires européens. Cette gestion se fonde notamment sur le principe du rendement maximal durable (RMD), c'est-à-dire la plus grande quantité de biomasse que l’on peut extraire en moyenne et à long terme d’un stock halieutique dans les conditions environnementales existantes sans affecter le processus de reproduction (définition FAO).
S'agissant de la "pêche électrique", le règlement européen n°2019-1241 publié le 25 juillet 2019 interdit, à compter du 1er juillet 2021, la pêche au chalut associé au courant électrique impulsionnel dans les eaux de l’Union européenne. Il s’agit d’une avancée majeure dans la protection des écosystèmes marins et donc des ressources qui en dépendent. La France a interdit la pêche électrique dans ses eaux dès le 14 août 2019, sur le fondement de ce règlement qui autorise les Etats membres à en décider l’interdiction immédiate non discriminatoire dans les eaux sous leur souveraineté, jusqu’à 12 miles marins des côtes.
Enfin, l’application du cadre réglementaire est soumise à un strict contrôle de la part des autorités maritimes. Les navires ayant commis des activités de pêche illégale, non documentée et non réglementée (dite pêche INN), qui contribuent significativement au phénomène de la surpêche, sont inscrits sur des « listes de navires INN » et font ensuite l'objet de mesures de sanction, l'accès aux ports pouvant leur est refusé